La compénétration entre la langue commune et le langage juridique est une condition nécessaire pour l’existence et pour le fonctionnement du droit, qui est enraciné dans la société elle-même. En effet, le langage du droit représente une forme sociale très élaborée de la langue générale : il vit en s’intégrant à la langue commune, dans laquelle il puise à la fois son origine linguistique et historico-culturelle. Il semble donc légitime de penser que le grand public, les « profanes » (en opposition aux experts et aux professionnels du domaine) peuvent avoir accès au langage juridique, sans pour autant avoir fait des études spécifiques en droit, comme paraît le soutenir l’adage nul n’est censé ignorer la loi. Or, pour ne pas ignorer la loi, il est nécessaire d’en comprendre la terminologie qui en véhicule les notions. Ainsi, nous avons pris en considération deux dictionnaires usuels très répandus – le Petit Robert (PR 2004) et le Petit Larousse (PL 2005) – afin de vérifier dans quelle mesure et comment ces instruments, consultés par le grand public pour approfondir leurs connaissances sur la langue française, le sens des mots et leurs référents (juridiques, dans ce cas), offrent la possibilité de se rapprocher de l’univers du droit. Partant de la nomenclature du Vocabulaire Juridique (VJ) de G. Cornu (2002), nous avons parcouru la portion de macrostructure de la lettre « A » du PR et du PL – en tant qu’échantillon méthodologique qui pourrait être élargi et approfondi – en recherchant les entrées marquées par l’indicateur DR (« droit ») et donc manifestement reconnues par les lexicographes eux-mêmes comme appartenant au domaine juridique.Cette comparaison montre l’absence d’homogénéité et la difficulté de découpage des sens juridiques parmi les dictionnaires, mais aussi à l’intérieur d’un même ouvrage. Dans un corpus de 510 entrées, 446 seulement apparaissent dans le VJ. Il s’ensuit que 64 entrées signalées en tant que juridiques à travers la marque DR, soit par le PR, soit par le PL, soit par les deux, ne sont pas attestées dans la nomenclature du vocabulaire spécialisé. En revanche, de nombreux termes juridiques font partie de ces macrostructures, mais sans être signalés comme spécialisés. Dans ce cas, il est probable que les compilateurs ressentent désormais ces termes comme faisant partie du langage commun et qu’ils les considèrent donc suffisamment connus par les usagers. Notre réflexion portera donc sur les modalités d’enregistrement lexicographique, sur les différents traitements des définitions – terminologiques et spécialisées dans le VJ (qui découpe le sens en de nombreuses acceptions), lexicographiques et moins spécifiques dans le PR et PL (qui rendent compte de moins de nuances) – ainsi que sur le niveau d’approfondissement des notions juridiques de la part des ouvrages lexicographiques d’usage. Il nous parait donc légitime de nous interroger à propos de l’utilité et de la fonction de ces derniers dans la compréhension du langage juridique qui imprègne la vie quotidienne des citoyens.

Terminologie juridique et vocabulaires d’usage: l’enregistrement du vocabulaire spécialisé dans le Petit Robert et le Petit Larousse / Preite, Chiara. - STAMPA. - (2012), pp. 275-296.

Terminologie juridique et vocabulaires d’usage: l’enregistrement du vocabulaire spécialisé dans le Petit Robert et le Petit Larousse

PREITE, Chiara
2012

Abstract

La compénétration entre la langue commune et le langage juridique est une condition nécessaire pour l’existence et pour le fonctionnement du droit, qui est enraciné dans la société elle-même. En effet, le langage du droit représente une forme sociale très élaborée de la langue générale : il vit en s’intégrant à la langue commune, dans laquelle il puise à la fois son origine linguistique et historico-culturelle. Il semble donc légitime de penser que le grand public, les « profanes » (en opposition aux experts et aux professionnels du domaine) peuvent avoir accès au langage juridique, sans pour autant avoir fait des études spécifiques en droit, comme paraît le soutenir l’adage nul n’est censé ignorer la loi. Or, pour ne pas ignorer la loi, il est nécessaire d’en comprendre la terminologie qui en véhicule les notions. Ainsi, nous avons pris en considération deux dictionnaires usuels très répandus – le Petit Robert (PR 2004) et le Petit Larousse (PL 2005) – afin de vérifier dans quelle mesure et comment ces instruments, consultés par le grand public pour approfondir leurs connaissances sur la langue française, le sens des mots et leurs référents (juridiques, dans ce cas), offrent la possibilité de se rapprocher de l’univers du droit. Partant de la nomenclature du Vocabulaire Juridique (VJ) de G. Cornu (2002), nous avons parcouru la portion de macrostructure de la lettre « A » du PR et du PL – en tant qu’échantillon méthodologique qui pourrait être élargi et approfondi – en recherchant les entrées marquées par l’indicateur DR (« droit ») et donc manifestement reconnues par les lexicographes eux-mêmes comme appartenant au domaine juridique.Cette comparaison montre l’absence d’homogénéité et la difficulté de découpage des sens juridiques parmi les dictionnaires, mais aussi à l’intérieur d’un même ouvrage. Dans un corpus de 510 entrées, 446 seulement apparaissent dans le VJ. Il s’ensuit que 64 entrées signalées en tant que juridiques à travers la marque DR, soit par le PR, soit par le PL, soit par les deux, ne sont pas attestées dans la nomenclature du vocabulaire spécialisé. En revanche, de nombreux termes juridiques font partie de ces macrostructures, mais sans être signalés comme spécialisés. Dans ce cas, il est probable que les compilateurs ressentent désormais ces termes comme faisant partie du langage commun et qu’ils les considèrent donc suffisamment connus par les usagers. Notre réflexion portera donc sur les modalités d’enregistrement lexicographique, sur les différents traitements des définitions – terminologiques et spécialisées dans le VJ (qui découpe le sens en de nombreuses acceptions), lexicographiques et moins spécifiques dans le PR et PL (qui rendent compte de moins de nuances) – ainsi que sur le niveau d’approfondissement des notions juridiques de la part des ouvrages lexicographiques d’usage. Il nous parait donc légitime de nous interroger à propos de l’utilité et de la fonction de ces derniers dans la compréhension du langage juridique qui imprègne la vie quotidienne des citoyens.
2012
Sémantique et lexicologie des langues d'Europe: théories, méthodes et applications
9782753518254
Presses Universitaires de Rennes
FRANCIA
Terminologie juridique et vocabulaires d’usage: l’enregistrement du vocabulaire spécialisé dans le Petit Robert et le Petit Larousse / Preite, Chiara. - STAMPA. - (2012), pp. 275-296.
Preite, Chiara
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